D'où viennent les partitions ? Petite histoire de la notation musicale (2024)

Histoire

Par Alexandra James

Publié le

Avec leurs bécarres, leurs triples-croches, ou leur clé d’ut, les partitions peuvent donner du fil à retordre pour quiconque débute le solfège. Mais d’où viennent tous ces symboles? Et comment notait-on la musique avant?

Dans les années 1950, des archéologues français ont découvert en Syrie des tablettes d’argile avec une écriture cunéiforme inscrite dessus. En les analysant, ils s’aperçoivent qu’il s’agit d’un hymne en l’honneur d’une déesse de la mythologie mésopotamienne, datant d’environ 1400 ans avant Jésus-Christ.

«Ces tablettes, découvertes dans la cité antique d’Ugarit, sont en fait la plus ancienne trace de notation musicale retrouvée», explique Bilal Alnemr, violoniste originaire de Syrie et co-fondateur de l’association Ugarit. «Depuis, un musicologue a retranscrit musicalement l’une des tablettes. C’est une mélodie très douce, que j’ai appris à jouer au violon grâce aux transcriptions».

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Ces exemples de notation sont nombreux à l’Antiquité, notamment chez les Grecs, comme l’expose Nicolas Donin, musicologue: «Pour nous, le référent en Occident, c'est vraiment la Grèce. Ces notations, elles utilisaient un système qu'on sait déchiffrer aujourd'hui et qui ne ressemblait pas du tout au nôtre. Pendant longtemps, la notation s'est faite à travers des lettres.»

Des neumes à la portée musicale

Pour trouver une notation spécifique pour la musique, il faut attendre le Moyen-Âge. Pour s’aider dans leurs chants liturgiques, les moines ont ajouté des petit* symboles au-dessus des textes: c’est ce qu’on appelle les neumes. Ils indiquent la hauteur des syllabes du texte.

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«Parmi les neumes par exemple, il y a le punctum, c’est une note. Il y a aussi la virga, c'est aussi une note, mais qui est plus aiguë. En général, elle est notée avec une sorte de trait, qui indique que la voix va plus haut. Et puis il y a un certain nombre de signes pour indiquer qu'on a des mouvements ascendants ou descendants d’une, deux, ou trois notes», précise le musicologue.

Au XIe siècle, le moine bénédictin Guido d’Arezzo introduit un système à quatre lignes, pour placer les notes selon leur hauteur: la portée est née. C’est d’ailleurs ce même moine qui donne leurs noms aux notes, en reprenant les vers d’un hymne à Saint Jean-Baptiste: les notes “ut”, “ré”, “mi”, “fa”, “sol”, “la” font leur apparition. Le “si”, quant à lui, apparaît au XVIIIe siècle.

La révolution de l'imprimerie

Avec l’imprimerie, les partitions commencent à s’harmoniser. Les notes prennent une forme ronde, progressivement sur des portées de cinq lignes. «L’imprimerie va aussi contribuer à diffuser un type de répertoire qui passe bien à l’imprimerie, qui est le répertoire instrumental», poursuit le musicologue. «On a eu d'un côté les tablatures qui se sont développées, et de l'autre côté, une notation pour le chant, pour la voix. Ce qui se passe, c'est qu'elles vont s'influencer l'une et l'autre.»

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Malgré ce développement, les partitions n’indiquent pas tout. Selon les époques, les compositeurs laissent des indications pour les musiciens. «Dans la musique baroque par exemple, on sait grâce aux traités qu'on a le droit d'ornementer, c’est-à-dire de rajouter des notes», illustre Gabriel Pidoux, hautboïste. «Àchaque époque, il y a un coin oublié du compositeur ou de la compositrice qui laisse beaucoup plus de choix quant à l’interprétation.»

La liberté d'interprétation

Au XVIIIe siècle, la partition, telle qu’on la connait aujourd’hui, prend véritablement forme. Avec une portée de cinq lignes, des notes blanches ou noires avec des hampes, et tous les symboles indiquant la manière de jouer un morceau. «Par exemple, on a des signes pour dire que des notes sont piquées, détachées, staccato ou liées. D’autres signes pour indiquer des nuances: piano, forte. Mais aussi des variations de nuances, comme un crescendo, ou un decrescendo. En marge, on trouve aussi une marque métronomique, qui indique le nombre de battements par minute», précise Nicolas Donin.

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Toutefois, des compositeurs réfutent cette notation standard, et s’affranchissent de cette codification en créant des partitions graphiques. Mais même la partition la plus classique renferme une certaine liberté pour le musicien qui la découvre, comme l’explique Gabriel Pidoux: «Se retrouver devant une nouvelle partition, c'est toujours un peu un moment d'introspection, de solitude, mais c'est toujours tout un nouveau monde qui s'ouvre à nous».

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